Psychédélisme (Grande-Bretagne)
Southampton University. Pink Floyd annoncé en concert. Des musiciens jouent, sans leur leader, orphelins, après avoir fait le choix de ne pas aller le chercher. Cruel dilemme. Pink Floyd sans Syd Barrett, une équation insoluble, un contre-sens, une facétie de l’histoire, on ne sait pas trop.
C’est vrai, il était la flamme, l’impulsion créatrice de ce rock psychédélique branché et bariolé, étourdissant et assourdissant… Mais il ne sera pas là ce fameux soir, le « diamant fou »… qui n’aura cessé de briller sur ce premier album légendaire, celui du joueur de pipeau aux portes de l’aube.
Il est tellement désarmant d’imaginer le Cid, à l’origine d’une œuvre, ne plus pouvoir la soutenir en live, lui insuffler une seconde vie en concert… Volontairement ou non, là n’est plus le problème. Les droguent auront raison de tout, et auront été la Raison de ce premier opus, faisant végéter d’innocentes petites pop songs dans un psychédélisme acide et bouillonnant.
Enfin petites pop songs… ne nous égarons pas trop vite : il y a cette longue odyssée narcotique, ‘Interstellar Overdrive’, ses 10 minutes qui font de ce (white) highlight le point focal de toutes les tensions. Et puis un morceau spatial avant tout… caractère déjà annoncé par l’ouverture : ‘Astronomy Domine’ (prononcez « domini » paraît-il…) Le reste oscille entre délires psyché miniatures et pop songs obscures et chantantes, avec toujours cette volonté expérimentale et cette sensibilité mélodique sixties.
De la qualité certes, mais à quel point cette musique est-elle dotée d’éternité ? Aussi bien chez les fans que dans le groupe, la question de l’avenir est engagée. « Comment Pink Floyd va soutenir le départ de Syd Barrett ? » pourrait être une problématique, musicale et humaine, les hantant à jamais. Les textes des chansons ultérieures, comme leurs dynamiques, sont autant de choix et de ressentis, parfois directement affectés par l’anéantissement de la première version du Floyd.
Depuis ce premier album enregistré à Abbey Road, la route fut longue. Enfanter un des classiques indéboulonnables du psychédélisme n’est pas sans logique et postérité : Pink Floyd sera toujours dans une ambivalence, entre faire de la musique et proposer une expérience qui dépasse cette dernière. Mais si tant de questions résonneront toujours dans les têtes d’un groupe désormais décapité, l’histoire de The Piper… s’arrête bel et bien ici, disque isolé mais porteur de sens, comme son chanteur désormais délaissé, un soir de concert, à Southampton University.
Note : 4,5/6
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