Kosmische Musik (Allemagne)
Tonnerre et méditation. Ash Ra Tempel, formé en 1971 par Manuel Göttsching, Klaus Schulze et Harmut Enke, prend sa place dans la galaxie krautrock, quasiment dès sa genèse. Deux longs morceaux, respectivement de 20 et 25 minutes, composent ce premier album éponyme. Les premières nappes planantes et menaçantes d’‘Amboss’ font leur apparition. Le ciel infini semble gronder et nous projeter dans un univers cosmique, psychédélique, stratosphérique. De ce bain de claviers ambiants et futuristes émerge un rock puissant en fusion. S’ensuit ainsi un jam spatial et gondolé où guitares furibardes et acides se déchaînent sous fond de martellements explosifs. Dans son livre Krautrocksampler, Julian Cope fait un parallèle saisissant avec l’énergie et la véhémence annihilatrices qui animent la scène de Détroit. La forme est différente, mais le fond serait le même, tout du moins en partie. Ash Ra Tempel ne coupe cependant pas ses racines de la musique allemande, tout en y ajoutant une vitalité spirituelle et ésotérique supplémentaire. Si le jam brille par sa spontanéité, Ash Ra Tempel ajoute dans ses morceaux l’apport de la technologie et une tonalité résolument progressive, étirant ses morceaux à l’infini : du punk dilué d’une certaine manière, mais avec une intensité continue. En tout cas, ‘Traummaschine’, qui constitue la seconde face du disque, demeure beaucoup plus ambient. Les claviers caverneux d’outre-tombe se dévoilent lentement, tels des ombres approchant. Leurs harmonies nous transportent, semblent déchirer le ciel, semblent gémir aussi. L’osmose est remarquable et ‘Traummaschine’ fait figure de grande réussite, une des plus belles pièces du mouvement kraut. Le cœur du morceau s’agite davantage, avec ces percussions qui pilonnent et tonnent, avec ses guitares qui sifflent… Après une brève accalmie, un solo de guitare émerge pour l’ultime assaut, puis cette épopée retombe merveilleusement dans les atmosphères minimalistes, angoissantes et désolées. On sent encore les palpitations du morceau, entretenues par des motifs de guitare lumineux. C’est donc là aussi la réussite de ce premier album : le mélange turbulent rock/atmo, alliage bouillant et tumultueux, prend bien et prépare, poursuit, illustre certains aspects du prog, du kraut, du punk, du space rock… ART nous fait entrer dans son temple éclectique et visionnaire, et signe ici l’une de ses œuvres les plus fortes.
Note : 5/6
Note : 5/6
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