Rock (USA)
Le troisième Velvet, l'album gris sobrement intitulé The Velvet Underground, pourrait explorer les recoins de la Factory après les ravages noctures d'un jam dévastateur, ‘Sister Ray’. Dans l'intimité d'un songwriting souvent retenu et clos sur lui-même défilent onze mélodies sur un fond de velours, tout juste éclairées par la pénombre des soirées intimistes. Tout comme la présence de Cale, l'avant-gardisme ne semble n'être qu'un lointain souvenir. Pourtant, ces compositions ne sont pas de naïves chansonnettes sans intérêt, d'autant plus que ce recueil renferme 'The Murder Mystery' à la rythmique fugace et frénétique, sorte d'exception au disque. Ici, on s'assoit, on s'arrête de parler et on écoute. Sur le canapé de la Factory plus précisément.
On ne subit plus tellement les attaques meurtrières de la musique déchirante du Velvet, même si l'on craint une fois encore le songwriting impossible, décadent et dangereux de Lou Reed. Les titres offerts par le groupe ne sont plus que séquelles vicieuses et peurs omniprésentes, soulagements éphémères et désirs embrumés. La musique du Velvet a des cernes et la gueule de bois, mais tétanise encore, décrit encore une fois le visage de la mort et de la destruction. La voix schyzophrène de l'album, tantôt possédée par Reed tantôt empruntée par son alter ego (coéquipier ? adversaire ? rival ?) Doug Yule, se faufile, serpente dans les visions torturées du récital velvetien. Dans une lumière tamisée et à travers une fumée discrète émerge ‘Candy Says’... À ce sujet, les collants d'un(e) jeune travesti(e), Candy Darling, sont peut-être le linceul du Velvet des deux premiers albums, décédé de mort violente.
Le ventre a terre, le groupe soupire encore quelques chansons tout juste effleurées par des voix fluettes et parfois même trop fatiguées. ‘What Goes On’ tout d'abord, rock intransigeant, entêtant, relevé et monstrueux. Et puis ‘Pale Blue Eyes’ et ‘Jesus’, et leurs mélodies froides et mélancoliques. Le lascif ‘Some Kinda Love’ surtout, avec son beat autoritaire, classique parmi les classiques. Enfin, ‘Setting Free’, cantique des cantiques, une des plus belles compositions de Reed première époque. La sister Ray est loin, mais derrière ce songwriting de junkies désintoxiqué se cachent encore efficacité et émotions, lyrisme et souffrance marquée. L'esprit du Velvet marque encore une de ses œuvres, par sa présence presque impalpable, morbide et spectrale.
Note: 4/6
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