jeudi 8 mars 2012

FENNESZ Endless Summer (2001)

Fennesz - Endless Summer
Expérimental / Electronique / Textures (Autriche)


Des bruissements électroniques, rugueux, saccadés, industriels, mécaniques… et de douces mélodies ambiantes perceptibles en filigrane : bienvenu dans le monde digital de Christian Fennesz. L’ambivalence d’Endless Summer réside bien ici, dans cette confrontation féconde. Les sons de guitares sont traités, manipulés, voire torturés. Et de cet authentique travail sur les textures sonores, pas toujours très loin des frontières bruitistes, surgissent des mélodies mélancoliques, planantes, mystérieuses et évocatrices. Cet essai expérimental, scientifique, technique et archi-soigné, nous tient pourtant à distance d’une forme de terrorisme musical, les couches sonores restant légèrement douces et peu agressives. D’ailleurs, dans Endless Summer, l’ouïe et le toucher se rapprocheraient presque.

Plusieurs morceaux peuvent se démarquer. Déjà, ‘Got to Move on’ aurait pu être une bonne introduction au traitement toxique et alambiqué des sons du disque. Puis comptons sur ‘A Year in a Minute’, morceau très prenant pour son atmosphère à la fois contenue et post-apocalyptique, appuyée par une mélodie un peu sinistre plongée dans un bain de crépitements. Je pense aussi à la mélancolie diaphane du soyeux ‘Shisheido’, ou encore à ‘Caecilia’, autre petit rayon lumineux et mélodique. Il y a également cette curiosité, ‘Before I Leave’, certes un peu irritante, mais assemblant et conjuguant des samples d'orgue des Beach Boys à la façon « disque laser rayé » de manière assez déroutante. En fait, seul le morceau-titre, pas désagréable pour autant, reste peut-être un tantinet en deçà du reste et fait figure de demi-déception, en étant sévère.

Mais parlons de l’essentiel : ‘Happy Audio’. Une référence du genre, un titre phare. Mises à part ses exceptionnelles textures de sons, ce qui est fascinant ici c'est la façon dont le morceau évolue. Après s’être installé face à ces grésillements répétitifs et hypnotiques, exquis, on a véritablement l'impression qu'un second morceau, larvé, émerge peu à peu. La musique mute. Vers le dévoilement de quelque chose de mystérieux, surgissant progressivement, de façon saisissante. Les ambiances sont captivantes, profondes, les sons tournoient, sont pris au piège dans des boucles et des effets rotatifs. Ils sont en effusion permanente. Et c’est sur ce morceau d’une dizaine de minutes, conçu et exécuté avec une grande maîtrise, que le disque nous abandonne.

Finalement, une musique dans laquelle les parasites sonores deviennent la norme, voilà peut-être ce que nous présente Christian Fennesz. De par son titre, sa thématique et son essence cachée, Endless Summer reste aussi une référence aux Beach Boys, une forme de filiation spirituelle avec Brian Wilson, sur une autre latitude. Cependant, l'horizon qu'il définit demeure très personnel, au-delà de ses influences. Et cette saison électronique qu'il dépeint ressemble à un été bien singulier, équivoque, légèrement amer, rafraîchissant et lumineux. Presque infini.

Note : 5,5/6

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire