mardi 6 mars 2012

NICO The Marble Index (1969)

Nico - The Marble Index
Expérimental / Avant-garde (Allemagne)


Avec The Marble Index, ce n’est plus pareil. Nico compose ses morceaux, conçus et interprétés avec l’appui minutieux de John Cale (alto électrique, guitare et basse, orgue et piano…) Désormais, on entre dans son univers. On connaissait déjà sa voix, encore bridée sur le premier disque. Sur Marble Index, on la découvre avec un harmonium indien, son instrument symbolique.

Un décor sombre et morose, gothique, semble être le siège de ce disque. La voix de Nico, libérée, se faufile et danse hors des morceaux, ayant davantage l’allure de flux de conscience, ou de prières intérieures. Comme Nick Drake, Nico conte un pathos intime avec une forme de violence rentrée. Cela rend le résultat d’autant plus puissant (et non moins théâtral et tragique). La nudité du chant imperturbable de Nico, marié aux vagues d’un harmonium inquiétant, se confronte au savoir avant-garde de John Cale. Il en résulte une musique originale, sérieuse et stoïque, à la fois impressionniste et surréaliste, et dotée d’une sensibilité européenne.

Si le disque reste inédit pour le monde du rock et se tourne indubitablement vers l’avenir, il semble aussi célébrer d’une certaine façon et non sans paradoxe une musique ancienne (au charme antique ? aux accents médiévaux ?), à moins qu’elle ne vienne finalement d’un autre temps et d’un autre monde, froid et désolé. Et c’est justement ce tout dernier point qui me fait penser l’existence d’un lien prégnant entre le contenu du disque et les images mentales que l’on peut s’en faire. Cette relation n’est d’ailleurs pas étonnante puisque Nico mêle dans sa manière de composer le cinéma à la musique, les visions aux sons.

L’ensemble des morceaux est très homogène. On retient par exemple ‘No One Is There’ et ses cordes ; ‘Ari’s Song’, morceau à l’harmonium, dédié à son fils ; ou encore ‘Evening of Light’, cristallin et hypnotique, vraiment prenant. La réédition CD contient deux titres supplémentaires ‘Roses in the Snow’, complainte assez réussie, et ‘Nibelungen’, totalement a cappella. L’album aura peu de succès commercial, malgré son influence artistique. Il laisse un certain malaise, car on a étrangement du mal à savoir si le disque est beau ou dérangeant. Le paradoxe d’un style qui va se poursuivre à un niveau supplémentaire, sur Desertshore.

Note : 4,5/6

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