mercredi 25 août 2010

SPARKLEHORSE It's A Wonderful Life (2001)

Sparklehorse - It's A Wonderful Life
SUPPLÉMENT : Rock Indépendant (U.S.A.)


Sparklehorse est un projet américain créé par Mark Linkous en 1995, songwriter multi-instrumentiste issu de Dancing Hoods et de The Johson Family (Salt Church Mary). Sous l’emprise de Johnny Cash et inspiré par Neil Young, il s’inscrit dans un mouvement de pop/rock lo-fi imprégné de la tradition folk américaine qu’il tente de renouveler, un peu à la manière de Grandaddy, voire des immenses Mercury Rev. Linkous apporte parfois une touche expérimentale à ses compositions, sans vouloir pour autant atteindre les excès étourdissants du psychédélisme d’antan. Ayant assimilé un certain héritage punk (The Damned et The Sex Pistols) et appréciant profondément les Pixies, Sparklehorse parsème également ses disques de chansons plus brutes, nerveuses et tendues.

Troisième album de Sparklehorse, It’s a Wonderful Life demeure définitivement une œuvre plus homogène, équilibrée et profonde que Vivadixiesubmarinetransmissionplot et Good Morning Spider, déjà deux opus de grande qualité. En outre, Linkous a su s’entourer de musiciens capables de mettre en valeur ses intuitions artistiques et de faire ressentir tout l’arôme de sa musique : Nina Persson de The Cardigans sur ‘Gold Day’ et ‘Little Fat Baby’ ; PJ Harvey sur ‘Piano Fire’ et ‘ Eyepennies’ ; Jane Scarpantoni, Joan Wasser (Those Bastard Souls) et Margaret White pour une section de cordes. N’oublions pas que Linkous a conçu Sparklehorse en s’inspirant de Swordfishtrombone de Waits, d’où la présence de ce dernier sur ‘Dog Door’. La production est quant à elle assurée, non sans hasard, par David Fridman (Mercury Rev) et John Parish (PJ Harvey). Enfin, le disque contient un titre fantôme, ‘Morning Hollow’ que nous retrouverons sur l’album suivant.


La musique de Sparklehorse semble chancelante, ébranlée, indécise. Derrière les allures d’imperfection de leurs compositions, Linkous et son cheval étincelant savent pourtant où ils nous emmènent : vers un univers personnel, poétique et introspectif, avec l’intimité que l’on trouve parfois chez Pearls Before Swine. Cette fois-ci, les guitares s’effacent délibérément dans un ensemble musical organique sur lequel se pose la voix fragile et frémissante du songwriter. Tout en retenue, Linkous suit dès lors les pas de Nick Drake pour nous conter son histoire. Surtout, It’s a Wonderful Life demeure une collection de pop songs dont l’homogénéité impressionne. De la berceuse diaphane ‘Gold Day’ à la nostalgie brûlante de ‘Babies on the Sun’, Linkous dissémine dans son œuvre quelques mélodies d’éternité (‘Eyepennies’, ‘Sea of teeth’ & ‘Comfort Me’) et nous offre deux autres belles réussites : ‘Dog Door’, dans la veine de Captain Beefheart, et le désabusé ‘King of Nails’. Victime d’un accident en 1996, Linkous ne connaîtra pas le destin tragique de Robert Wyatt ou de Vic Chesnutt, dont ‘Little Fat Baby’ rappelle le songwriting pénétrant. Ironique et ambigu, le titre de l’opus nous questionne ainsi irrémédiablement sur le goût que nous avons finalement, pour l’existence. Discrète et pastorale, mélancolique comme celle des Red House Painters, la pop de Sparklehorse devient alors un éveil musical nostalgique, où défilent les souvenirs de la vie, une oscillation vertigineuse et hésitante entre les cimes d'un bonheur accompli et les abysses d'un désespoir déchu, mais jamais vaincu, toujours présent et hantant un disque meurtri par les séquelles et l’absurdité des questions que perpétuellement le monde nous pose.

Note : 6/6

(Chronique réalisée du 8 au 12 novembre 2007)

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