lundi 20 février 2012

SUICIDE Suicide (1977)

Suicide - Suicide
SUPPLÉMENT : Punk/Post-Punk/No-wave/New-wave/Synth-Pop/Industriel (U.S.A.)


Suicide est punk, intrinsèquement. S’il végète sur les cendres de ce mouvement passé et dépassé, mort en pleine explosion, il en garde le côté dépravé, salasse, urbain. Le punk n’existe plus, alors tout est possible. Place au divin. Un disque de synth-pop cradingue, voilà la bonne nouvelle. La révélation même, un rêve un peu cauchemardesque qui chamboula le paysage rock. Deux acteurs : Martin Rev & Alan Vega. Deux héros contemporains. Ils nous ont concocté une musique qu’on aimerait écouter uniquement sous des réverbères blafards, errant péniblement sur les trottoirs ternes et pisseux de nos villes modernes et étouffantes. Le premier album de Suicide est un carrefour. Il est aussi new wave, pour ses synthés poisseux et ses rythmes tendus. Il est également no wave dans l’esprit, pour la désillusion qu’il véhicule. Mais avec un tel esthétisme qu’elle en devient espoir. Enfin, il est industriel, dans son apparence martiale et dans ses thématiques d’aliénation. Alors voilà la recette : les incantations d’Alan Vega, ses glapissements, ses halètements anxiogènes, pulsés par le beat terrifiant des machines électroniques de Martin Rev. Ouais, ce beat acide, perfide, mécanique, on le retrouve un peu partout dans le disque, même s’il semble muter. Et puis ces synthés barbouillés… bien sûr. Un truc de sagouin en somme, mais qui sonne vraiment impeccable. Le tout animé par l’âme du disque, zénithale et narquoise. C’est elle qui détourne et maltraite le rockabilly sauvageon et classieux de ‘Ghost Rider’, entêtant et terrible. C’est elle qui façonne l’autoritaire et atmosphérique ‘Rocket U.S.A.’ tout comme le mélancolique ‘Che’. À moins qu’il ne s’agisse de l’âme damnée de ‘Frankie Teardrop’. Le trauma. Ce beat cinglant dans la tête, cette ligne de basse vile et visqueuse qui s’introduit dans le morceau et voici le titre le plus éprouvant du siècle. Un mythe, un peu trop morbide, mais qui ravage de l’intérieur, frissonnant. Une expérience d’épouvante, presque cinématographique. Et pourtant je n’ai envie que de garder l’euphorie lumineuse vers laquelle ce disque nous mène. Un peu à la façon du premier Velvet, l’œuvre est obscure mais reste teintée d’une aura fulgurante et diaphane nous irradiant de son mysticisme et de son énergie. On retrouve bien ce sentiment dans le romantisme faussaire de ‘Cheree’, les obsessions lascives un peu kitsch de ‘Girl’ ou dans les notes d’espoir de ‘Keep your Dreams’, titre bonus et salvateur. Le premier album de Suicide est une renaissance. Primaire et un peu intello quand même, il représente l’envers du monde moderne mais aussi sa nature propre. Musique minimale, impact maximal, et facilement un des disques les plus importants du siècle passé.

Note : 6/6

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